Une chose est sûre, le Belge est totalement gaga de ses animaux de compagnie. Selon les derniers chiffres officiels du SPF Économie (dévoilés en 2017), les ménages belges ont dépensé en une année 1,3 milliard d’euros pour leurs amis à poils et à plumes. Un amour démesuré pour ces membres de la famille à part entière qui a donné l’envie à certains de vivre chaque moment avec Médor et donc de le faire venir sur le lieu de travail. Certains sont totalement fan de l’idée, d’autres beaucoup plus réticents … en tout cas, la pratique fait débat. Le point avec des experts qui ont répondu à toutes nos questions.
Pour beaucoup, caresser son animal de compagnie est source de grande détente. Alors aller bosser avec son chien est-il un bon moyen de lutter contre le stress ? Est-ce vraiment une bonne idée ? Et pour le chien ? Quelles sont les éventuels inconvénients ? Peut-on parler de zoothérapie au bureau ? On fait le point.
Contenus
C’est quoi la zoothérapie ?
Daphné Stadnik, psychologue et zoothérapeute au centre de zoothérapie de Limelette (IZIS) nous explique : » La zoothérapie consiste à intégrer la relation entre un animal et une personne dans un contexte professionnel qui se veut thérapeutique pour permettre certains effets (changement, amélioration, apaisement) selon des objectifs assez précis. Cela nécessite l’intervention d’un professionnel du secteur de la santé, médical ou social (psychologue, assistant social, kinésithérapeute etc) dans le but d’améliorer la qualité de son travail auprès des bénéficiaires.«
La présence de l’animal et d’un professionnel sont donc des conditions primordiales pour cette thérapie. Il ne s’agit pas de simplement rentrer chez soi et caresser son chat, chien, etc. La zoothérapie dépasse le cadre du simple bien-être. En général une séance se réalise à trois : le thérapeute, le patient et l’animal. Il existe aussi des thérapies de groupe.
Quels en sont les bienfaits ?
Ils sont nombreux, tant au niveau physique que psychologique.
Physiquement, les mouvements naturels du corps sont sollicités. D’un point de vue psychomoteur, le fait de donner à manger à un animal, c’est déjà un travail. Par exemple, des personnes âgées qui n’utilisent plus leurs mains peuvent travailler cette faiblesse en brossant un lapin, par exemple.
Psychologiquement, on constate un plaisir, un apaisement, une diminution du stress. Cela augmente les capacités de socialisation, d’ouverture vers les autres. Quand on rencontre un animal, on construit une relation comme avec les humains. Et pour certains, c’est plus facile qu’avec quelqu’un car un chien ou un chat ne juge pas et ses intentions sont claires. On y trouve également la possibilité d’exprimer ses émotions, la confiance en soi, la responsabilisation (prendre soin de l’animal).
C’est fait pour qui ? La zoothérapie peut être pratiquée par tout le monde. « Toute personne peut, à un moment donné dans sa vie rencontrer un problème. C’est donc forcément accessible à tout le monde : de la personne qui travaille, qui a une vie de famille et qui a des anxiétés, un moment de dépression, à la personne en situation de handicap : comme un patient souffrant d’autisme, une personne âgée démente, etc. » précise Daphné Stadnik.
Avec quel animal ?
Les animaux en zoothérapie sont spécifiquement sélectionnés et éduqués à ce travail. Aucun animal agressif ne sera utilisé. Il faut qu’il soit sociable. Cependant, il existe des limites : ce travail se réalise avec des animaux domestiques qui sont habitués aux hommes.
1. Le chien
Celui qui remporte le prix du meilleurs animal « thérapeutique », c’est le chien. Plus facile à dresser et le plus proche de l’homme, il lui reste fidèle et est « son meilleur ami ».
2. Le chat
Partenaire privilégié de la ronronthérapie. Cela peut faire sourire les plus sceptiques mais les ronronnements du chat apaisent et réconfortent. Caresser l’animal diminue le stress et régule la fréquence cardiaque. Le chat est également beaucoup utilisé en zoothérapie (s’il ne griffe pas !)
3. Le cheval
Cette thérapie se nomme l’équithérapie. Faire de l’équitation ou être tout simplement en contact avec un cheval apporte de multiples bienfaits. Le toucher avec l’animal est très important et permet de soigner différents maux. En plus d’être une activité sportive, l’équithérapie développe aussi l’équilibre.
4. Le dauphin
La delphinothérapie est une thérapie qui se pratique au contact des dauphins. Le but n’est pas de se prendre pour la petite sirène mais d’effectuer une approche et un contact naturel avec l’animal. Les résultats de cette thérapie sont recherchés pour une rééducation physique par exemple ou pour améliorer la communication. Des spécialistes disent même que les dauphins sont capables de détecter des maladies ou des pathologies spécifiques.
Il existe encore bien d’autres animaux utilisés en zoothérapie comme la chèvre, la poule ou même le lama.
Mais l’utilisation de certains animaux comme le dauphin pose question quant à leur bien-être rappelle la zoothérapeuthe : « Ces animaux ont été arraché à leur habitat naturel et sont à l’origine des animaux sauvages. Des études ont démontré qu’ils sont vecteurs de bien-être pour les enfants. Mais quant est-il de celui de l’animal ? C’est une question importante dans le domaine de la zoothérapie. Certaines personnes non professionnelles ne prennent pas en compte le bien-être de l’animal et donc cela peut entraîner des dégâts. »
Et au bureau ?
Si après une journée chargée, retrouver notre animal nous fait du bien, cela n’est pas pour autant considéré comme de la zoothérapie pour les raisons expliquées ci-dessus. Ces conditions s’appliquent également pour la présence d’animaux (la plupart du temps des chiens) sur le lieu de travail. Sans être de la zoothérapie, leur venue au bureau peut tout de même réellement amélioré le bien-être des employés sur leur lieu de travail.
Par exemple, l’entreprise « Nestlé Purina » accepte la présence des chiens au bureau depuis 2015 et les résultats sont assez convaincants : diminution du stress, ambiance plus conviviale. Et au moins, le chien n’est pas tout seul toute la journée à attendre le retour de son maître.
Et s’il y a d’autres animaux sur le lieu de travail ?
Julie Willems, comportementaliste animalier nous explique : « S’ils se disputent, cela peut perturber les travailleurs. Si c’est un mâle et une femelle, on a plus de chances que cela se passe mieux. Si ce sont deux mâles ou deux femelles, il faut qu’ils établissent une hiérarchie entre eux. Un doit donc prendre la dominance sur l’autre. Ce qu’il faut c’est ne pas intervenir, les laisser « se disputer ». En faisant cela, les deux chiens devraient s’entendre. »
Un conseil ? L’éduquer dès le départ. « Il faut définir dès le départ ce que l’animal peut faire ou non. Par exemple, quand je reçois des clients, il doit rester dans son panier, ou ne pas sauter sur les gens qui rentrent, ne pas aboyer. Plus tôt on aura mis ces règles en place et plus on va s’y tenir, plus le chien sera éduqué et comprendra ce qu’il pourra faire ou non et au mieux la cohabitation entre chiens et entre collègues se passera. » ajoute Julie Willems.
Et question hygiène ?
La propreté des lieux mais aussi de l’animal sont des points très importants. Selon Patrick Randour, vétérinaire, il faut traiter régulièrement l’animal essentiellement contre les parasites (puces, vers, etc.) : « Le chien doit quand même être séparé de la partie où les gens mangent. Si le chien est entretenu, vacciné, il peut venir dans les bureaux. Mais il y a aussi les soucis d’allergies provoqués par les poils de chiens ou de chats. Le mieux est alors de ne pas amener l’animal. »
Pour les maniaques de la propreté ? Pas de peur à avoir ! Une petite lèche de votre toutou ne vous fera pas de mal selon Patrick Randour. « Le chien ne transmet pas de maladies bactériennes ou virales mais seulement parasitaires.«
Une pratique thérapeutique pour l’animal ?
Amener son chien au bureau est souvent un désir du maître avant tout, pour son bien-être personnel. Pourtant parfois, c’est l’inverse et « venir bosser » est un plus pour l’animal.
Princesse a 13 ans. C’est une petite chienne abandonnée qui a été recueillie par Pauline G., avocate. Le patron du bureau a accepté la venue de l’animal mais cela reste une exception dans ce cabinet. Pourquoi ? Princesse a peur quand elle est seule et dérangeait les voisins en aboyant toute la journée. L’avocate n’a donc pas eu d’autres choix que de la faire venir avec elle à son bureau.
« Au début, il a fallu s’adapter, j’étais quand même angoissée et elle le ressentait aussi. Vu qu’elle voulait toujours me coller, j’avais du mal quand j’avais des rendez-vous. Je l’ai donc laissé à des collègues durant mes absences. J’étais stressée de ne pas être avec elle. Mais quand elle est là, tout se passe bien. » raconte Pauline G.
L’apaisement est au final mutuel. La présence du chien apaise Pauline. Elle remarque même que la présence de Princesse démystifie le cliché de l’avocat auprès de ses propres clients. Cela lui donne un côté plus humain. Mais quand la maîtresse et le chien sont séparés, c’est aussi stressant pour l’un que pour l’autre.
D’ailleurs, les chiens sont les animaux qui s’adaptent le mieux à un environnement professionnel. Le chat quant à lui, préfère sa maison et ses petites habitudes. Il est déconseillé de le faire changer d’habitat.
Aurore, quant à elle, tient une agence de voyage en région wallonne. Elle travaille entourée de ses 5 chats. Ces derniers ont vu le jour dans son agence, ils sont donc des habitués des lieux. Leur présence apporte un cachet unique et une atmosphère unique à cette agence hors du commun.
Je suis bien avec mes chats ! C’est un confort en plus.
On a posé la question à la rédac
Á la rédaction, la star c’est Twombly, un Border Collie qui fait craquer tout le monde.
La directrice de la rédaction (et aussi la maîtresse de Twombly) Claudia Lomma explique que depuis qu’il est présent avec elle, les tensions se sont apaisées :
« J’ai travaillé dans une agence où les chiens n’étaient pas acceptés. Je devenais nerveuse car cela faisait quatre heures que mon chien était chez moi. Je rentrais à la maison le midi pour promener le chien, je revenais au bureau et à la fin de la journée je redevenais nerveuse. Niveau rentabilité pour le boulot, c’était zéro. Á partir du moment où j’ai pu prendre mon chien en entreprise, je n’ai eu aucun problème de culpabilité. Je peux travailler jusque 19h-20h. Je n’ai pas d’inquiétude puisqu’il est là. Ses besoins sont remplis et je peux travailler la conscience tranquille.«
On a aussi posé la question aux employés et les avis divergent sur la présence de chiens à la rédaction.
Pour Marie-Noëlle Vekemans, rédactrice en chef du ELLE.be, sa présence est un réel moment de détente : « Je suis plutôt une nana à chats mais j’adore les animaux en général. J’aime les voir, les toucher, etc. Personnellement, les côtoyer m’apaise. Par exemple, quand j’ai une journée un peu compliquée, parfois je vais dans les bureaux de mes collègues qui ont des chiens et je leur dis que j’ai besoin de voir leur animal. Je les caresse, je les sors et c’est vraiment une bulle d’air. »
Elodie Buski a un avis neutre sur la question : « J’aime bien les chiens mais les avoir au travail tous les jours, quand il y en a beaucoup je trouve que c’est assez agaçant car ils prennent beaucoup de place et ça sent pas toujours bon, etc. Mais en voir un de temps en temps c’est sûre que ça fait plaisir et ça met de bonne humeur.«
« Twombly est un chien très intelligent et quand il vient pour que tu lui lances la balle, il te le demande deux fois et il va comprendre qu’il ne faut pas t’ennuyer. » raconte Marie Guérin, rédactrice en chef du ELLE Belgique.
En exclusivité, on a voulu découvrir ce que Twombly peut apporter à la rédaction et si lui y trouve son compte… le résultat fait beaucoup sourire !
Une zoothérapie au boulot est donc possible ?
« OUI c‘est possible ! Cela doit être un moment particulier pour que les personnes puissent prendre une pause dans leur travail pour vraiment prendre le temps de se laisser aller avec l’animal. C’est la même chose que dans un institut spécialisé, une maison de repos. Mais il faut que ce soit bien organisé, structuré par un professionnel. » conclut Daphné Stadnik.
Bref, la zoothérapie est envisageable sur le travail de travail dans le cas d’un burn out, d’un stress intense, etc. Une séance individuelle vous coûtera une quarantaine d’euros pour 1 heure. Et oui, évidemment, on trouve toujours un bien-être et un réconfort auprès de notre petite boule de poils que ce soit au bureau ou à la maison.
Julia Verhelle